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jeudi 3 février 2011

Les bandes organisées se propagent à la campagne


Une marche silencieuse en hommage à Kamel a sillonné Villeneuve-sur-Lot, hier./Photo DDM, J.-M. Mazet.
Une marche silencieuse en hommage à Kamel a sillonné Villeneuve-sur-Lot, hier./Photo DDM, J.-M. Mazet.
Les phénomènes de bandes ne sont plus l'apanage des grandes villes. La délinquance organisée s'est aujourd'hui étendue aux villes moyennes et aux campagnes. Le Grand Sud n'est pas épargné par cette propagation.
La rixe mortelle qui a eu lieu, dans la nuit de vendredi à samedi dernier, à Villeneuve-sur-Lot, est l'une des terribles expressions de la percée de la délinquance organisée dans les petites villes. Ce soir-là, cette paisible commune de 22 800 habitants du Lot-et-Garonne, a été le théâtre d'affrontements entre deux bandes rivales. Près d'une trentaine de jeunes, encagoulés et armés de battes de base-ball, de bombes lacrymogène et de couteaux, se sont battus pendant plusieurs heures. Kamel, un jeune Villeneuvois de 20 ans a trouvé la mort, mortellement blessé par un coup de couteau.
« C'est du jamais vu dans le département ! ça relevait de batailles urbaines ! » a relaté, très impressionné, un policier.
Ces batailles rangées opposant des jeunes de Villeneuve et d'Agen pourraient avoir pour toile de fond le contrôle d'un trafic de drogue (lire encadré ci-dessous).
En novembre dernier, dans les Hautes-Pyrénées, les gendarmes avaient démantelé un réseau « rural » de trafiquants de drogue qui s'approvisionnait en Espagne. Il comptait neuf membres, dont certains vivaient dans le village de Vic-en-Bigorre, et « était organisé en système quasi professionnel » avait alors constaté l'un des enquêteurs. Il semble bien que le trafic de drogue soit devenu l'une des activités délictuelles les plus courantes en campagne même si les casses et les braquages ne sont pas rares non plus. Le 3 décembre dernier un casse à la voiture bélier a été perpétré aux dépens des Nouvelles galeries à Tarbes. Dans la nuit du 27 au 28 janvier c'est celle d'un centre commercial de Gaillac qui a connu le même sort. « Nous voyons bien que les modes opératoires des voyous des villes arrivent chez nous, dans nos bourgades. Des filières et des bandes s'organisent même ici », assure un gendarme du Gers.
Il semble bien, comme le dit Michel Valet, procureur de la République de Haute-Garonne, qu'il « n'existe plus de sanctuaire », de zone préservée en matière de délinquance organisée.
Guillaume Atchouel

Le chiffre : 5

heures > De violence extrême. C'est ce qu'a vécu la paisible localité de Villeneuve-sur-Lot dans la nuit du 28 au 29 janvier. Pas moins d'une trentaine de jeunes armés s'y sont affrontés.
« En matière de délinquance, il n'y a pas de sanctuaire géographique. Aussi, nous nous adaptons à la cartographie de la délinquance ». Michel Valet, procureur de la République de Haute-Garonne

"Ici on n'est pas à Chicago, on est à Villeneuve-sur-Lot !"

Cinq jours après la rixe qui a coûté la vie à Kamel El Garmaoui, 20 ans, Villeneuve-sur-Lot a retrouvé son calme. De la place Sainte-Catherine, pimpante et refaite de frais, aux bords du Lot, les commerces sont ouverts, accueillants, et les rues piétonnes de la bastide grouillent de passants venus profiter des soldes en ce froid mercredi. Et si le calme est revenu, la plupart des conversations tournent encore autour du drame et des bagarres qui ont émaillé la soirée et la nuit, entre 21 h 30 et deux heures du matin, faisant au final un mort et deux blessés par arme blanche.
Hier après-midi, une nouvelle marche silencieuse, en hommage à Kamel, a sillonné la ville, depuis la place Lafayette, jusqu'au quai surplombant le club d'Aviron où le corps a été retrouvé. Les 350 personnes se sont dispersées devant l'hôtel de ville, où une tante et un cousin de Kamel ont pris la parole, en lançant un appel au calme, demandant aux jeunes de renoncer à toute idée de vengeance : « Il faut arrêter, on n'est pas à Chicago ! Ici on est à Villeneuve-sur-Lot et à Agen ! Aller à Agen pour se venger, c'est entamer un cycle sans fin. Il faut laisser la justice et la police faire leur travail. » Des proches qui martèlent que Kamel est une victime de la fatalité, au mauvais endroit au mauvais moment : « ça aurait pu être n'importe qui, vous, moi… »
Du côté des commerçants, on veut surtout passer à autre chose : « Il faut arrêter de dire que Villeneuve est la ville de la peur », insiste Pierre Gonzalez, le président de l'Union des commerçants et artisans du Villeneuvois. « Il n'y a pas d'insécurité en ville, quelques incivilités tout au plus, du fait d'une poignée de jeunes. Vendredi soir, il s'agit d'un cas triste mais isolé. »
Une opinion diversement partagée chez les Villeneuvois : « C'est triste c'est sûr, mais il fallait s'y attendre », confie un riverain de la place Lafayette. « Depuis un an, il y a toujours la même bande de jeunes qui font leur trafic sur la place et sous les Cornières, ou sur les berges du Lot. Les mêmes qui mettent la musique à fond, portières ouvertes, jusque tard dans la nuit. » Une Villeneuvoise qui vit aussi au centre ville raconte : « On sait qui c'est, c'est toujours les mêmes, certains étaient d'ailleurs impliqués vendredi soir. Il n'y a pas souvent de faits graves, plutôt des séries d'incivilités, comme des insultes, des dégradations, du tapage. Mais quelquefois des bagarres assez sérieuses. ça nous pourrit la vie. »
Le député-maire, Jérôme Cahuzac, qui a été le premier en Lot-et-Garonne à doter sa commune de caméras de vidéosurveillance, pointe, lui, la diminution des effectifs de police et a interpellé le ministre de l'Intérieur à ce sujet.
Jérôme Schrepf

"Le monde rural n'est pas à l'abri"

Les campagnes sont-elles épargnées par les phénomènes de bande ?
Michel Valet, procureur de la République de Haute-Garonne. En matière de délinquance, il n'y a pas de sanctuaire géographique. Le monde rural n'est pas à l'abri des bandes organisées même si cette forme de délinquance est davantage liée à l'urbanisation, aux grandes villes.
à la campagne, cependant, il y a surtout des phénomènes de groupes favorisés par la consommation d'alcool et de drogue. Nous constatons d'ailleurs que l'usage des stupéfiants s'est répandu partout. Le rural est notamment très touché par les cambriolages perpétrés aussi bien par des bandes que des individus peu organisés.
Pour ce qui est des violences crapuleuses, elles sont encore essentiellement commises dans les villes, même si aucune zone n'est épargnée par la délinquance.
Comment expliquez-vous que les formes de délinquance qui n'avaient cours que dans les villes, atteignent désormais le monde rural ?
Sous la pression d'une action policière forte dans les grandes villes, des délinquants choisissent de se déplacer. On voit ainsi des trafics et des actes de délinquance s'organiser et se produire à la périphérie des grandes villes. La région n'échappe pas à cela.
Comment la justice, la police et la gendarmerie, s'organisent-elles pour lutter contre la délinquance organisée dans les campagnes ?
Nous travaillons de plus en plus en nous adaptant à la cartographie de la délinquance. Nous apportons des réponses en mettant en place des moyens et des actions là où c'est nécessaire et en fonction des affaires que nous devons traiter.
Propos recueillis par Guillaume Atchouel

De plus en plus fréquent

Avant Villeneuve-sur-Lot, d'autres phénomènes de délinquance en groupe ont mené à des situations de grande violence dans certains secteurs ruraux du Grand Sud.
Braquage sanglant à Moulin-Mage. En mai dernier, à Moulin-Mage dans le Tarn le client d'un bar a été tué au cours d'un braquage. Trois individus encagoulés, armés de fusils, avaient fait irruption dans l'établissement pour s'emparer du tiroir-caisse et de quelques cartouches de cigarettes.
Règlement de comptes à Millau. De son côté, la commune de Millau dans l'Aveyron a été le théâtre d'un règlement de comptes sanglants sur fond de dette liée aux stupéfiants, au mois de mai 2010. Dix-neuf personnes dont certaines portaient des cagoules, ont attaqué, avec des armes blanches, à leur domicile, un petit groupe d'Haïtiens. Un jeune Antillais de 21 ans est décédé après avoir reçu plusieurs coups de couteau.
Bagarre de rue à Carcassonne. Au mois de mars, une violente bagarre a éclaté dans une rue piétonne. Pour des raisons indéterminées, un trio s'en est pris à un homme d'origine gitane, handicapé. Ils lui ont porté de nombreux coups, notamment au visage, puis avaient giflé des jeunes femmes qui l'accompagnaient. La rixe a vite pris de l'ampleur. Des CRS ont dû intervenir en renfort. Une heure et demie plus tard, une nouvelle bagarre, peut-être en lien avec la première, a eu lieu.
Réseau de drogue dans le Tarn. Au mois de novembre, dans le Tarn, un réseau local de drogue avait été démantelé. Les gendarmes ont interpellé huit individus de 17 à 24 ans qui irradiaient le secteur de Lauzerte et Montaigu-de-Quercy.
Casse à la voiture bélier à Albi. Tout récemment, début janvier, trois malfaiteurs ont pénétré dans la galerie marchande des « Portes d'Albi » avant de défoncer à la voiture-bélier la devanture d'une parfumerie. La vidéosurveillance montrera trois individus, encagoulés et masqués, s'engouffrer, à bord de deux voitures dans la galerie marchande. Les deux véhicules dont l'un a été incendié ont été retrouvés à Toulouse et sa proche banlieue.



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