Laurent Fidèle, responsable sud-ouest de l'INAO ne souhaite ni commenter une décision judiciaire ni évoquer une affaire en cours. Néanmoins, il précise : « Les textes européens prévoient des contrôles de qualités analytiques et organoleptiques. C'est à l'ODG (organisme de défense et de gestion) de se positionner afin de définir les caractéristiques de son appellation et de former des dégustateurs ». Selon lui, dans les AOC françaises, peu d'attentes sont exprimées visant à prendre en compte des spécificités bio.
Cahors. Vers une (r) évolution de palais ?
Le goût d'un vin AOC doit-il être formaté ? Comment prendre en compte la diversité des vins présents sur le périmètre ? Faut-il une évolution des critères ? Telles sont les questions posées, au-delà du cas particulier de Charles-Michel Maratuech.
Jean-Marie Sigaud, président du syndicat de défense et président de l'UIVC (Union interprofessionnelle du vin de Cahors) en alternance avec Alain Janicot (président des négociants) est favorable à un débat sur une évolution du cahier des charges : « Il faut que la question d'une dégustation à part des vins bio soit débattue, y compris au plan national. Car les vins non sulfités évoluent très vite ». Dans une lettre envoyée en janvier dernier à M. Maratuech, Jean-Marie Sigaud souligne : « J'ai demandé aux responsables de l'ODG d'amender les règlements qui nous ont été soumis et d'autres que nous avons proposés car il faut prendre à la dégustation des vins présentés à l'agrément, des conséquences gustatives qui résultent du protocole vin bio. Il serait juste de respecter le consommateur libre de faire le choix de consommer un vin non sulfité avec les saveurs qui en résultent ou de consommer un vin sulfité. Il y a une réforme qui me semble légitime d'autant plus que sur les bouteilles, on exige la mention « contient des sulfites » pour signaler le risque d'allergie ».
Une question de goût
Thierry Simon, viticulteur bio et président de Lot AB Né va plus loin : « Il y a un problème au niveau du comité de dégustation. Beaucoup de vins sont retoqués et ce n'est pas pour autant que ceux qui sont agréés sont meilleurs. Il est très difficile de juger de manière organoleptiques ; cela demande beaucoup d'humilité et de bienveillance. Le niveau donné au comité de dégustation est trop important. Je pense qu'un cahier des charges de fabrication d'un vin AOC Cahors est déterminant mais une dégustation organoleptique ne l'est pas car c'est une question de goût. Qu'un vin soit bio ou pas, la question est la même ».
Frédéric Thiollet (laboratoire Thiollet qui a donné son feu vert sur les qualités analytiques et gustatives de la cuvée concernée de M. Maratuech), œnologue et membre du comité de dégustation estime : « La dégustation est un outil subjectif, qu'il faut garder mais reste sujet à caution. Le comité est composé de gens formés. On ne peut pas faire mieux dans la sélection du jury qui est bon et performant mais qui juge selon des critères et la sévérité de chacun. 10 % à 15 % des échantillons sont souvent d'abord écartés mais seulement 1 % à 2 % in fine éliminés. A mon sens, il faudrait faire preuve de plus de bienveillance, car certaines caractéristiques organoleptiques peuvent être considérées comme des défauts par certains mais recherchées par d'autres. Ne pas sanctionner à la dégustation mais faire preuve de pédagogie en signalant au producteur les légers défauts constatés, avec une éventuelle contre-visite ».
Le travail de hiérarchisation, actuellement mené par l'ODG est-il un élément de réponse ?
Nous n'avons pas réussi à joindre Maurin Béranger, président de l'ODG AOC Cahors pour qu'il puisse s'exprimer sur ce sujet et indiquer les prochaines pistes de l'ODG en matière d'agrément.
À suivre…