interview
PROPOS RECUEILLIS PAR LAURENT BENAYOUN.
Michel Bettane, journaliste très influent du vin en France, co auteur du guide qui fait référence, a dégusté des centaines de Cahors mardi et hier. Son avis est intéressant.
Son avis est recherché, redouté. Le journaliste Michel Bettane, auteur d'un guide de référence, « Bettane et Desseauve, grand guide des vins de France », dont la 5e édition est attendue en septembre, a dégusté à l'aveugle des dizaines d'échantillon de vins de Cahors, à la maison du vin. Nous l'y avons rejoint hier matin. Paroles d'expert.
Vous venez à Cahors régulièrement depuis 1981. Comment jugez-vous l'évolution des vins de l'appellation AOC ?
C'est vrai que lorsque nous sélectionnons les régions pour notre guide, je choisis toujours pour le sud ouest de venir à Cahors, dans le Madiran et le Jurançon. J'ai juste fait une pause entre 1985 et 1990. J'étais en désaccord avec quelques personnes d'une appellation qui était en régression.
Désormais je reviens deux à trois fois par an .Et alors ?
Cahors retrouve tranquillement une partie du fort coefficient de popularité auprès du public français, qu'elle avait dans les années quatre-vingts. Aujourd'hui, la plupart des viticulteurs font leur travail. L'arrivée d'une nouvelle génération, courageuse, déterminée et idéaliste, un nouveau conseiller technique, le travail de marketing intense mené par Jérémy Arnaud, le travail de viticulture, portent leurs fruits. Il y a à Cahors du progrès et de la fierté retrouvée.
Comment s'est déroulée cette dégustation ?
Très bien. J'ai pu découvrir en deux jours 140 échantillons de Cahors, soit 60 à 70 % de ce que produit l'appellation. Je pense que j'en retiendrai douze ou quinze pour le prochain guide. C'est bien.
Quels conseils donneriez-vous aux producteurs pour conquérir des marchés ?
J'échange beaucoup avec eux. On est critique mais notre relation est aussi de compagnonnage. Il faut améliorer la commercialisation. Il manque un vrai négoce à Cahors. C'est le drame de l'appellation depuis vingt ans. Du cahors à moins de 1 €, c'est une plaisanterie totale ! 10- 12 €, pour un cahors bien fait, ce n'est pas scandaleux. Et les grands cahors peuvent se vendre au-delà de 30 €. Il faut aussi des locomotives médiatiques pour être crédible.
Et que pensez-vous de la stratégie sur le malbec ?
Je n'y suis pas étranger… Il faut rappeler au monde entier que le malbec vient de Cahors et pas d'Argentine. Il fallait sortir du trou, c'est fait. Vendre du cahors à Goujounac, c'est très bien. Mais à Kuala Lumpur, c'est l'avenir !
Quels sont vos coups de cœur sur le vignoble ?
En matière de vinification et d'élevage, Pascal Verhaege (le Cèdre) s'impose. En plus, il est généreux et aide les jeunes. Il y a aussi des jeunes très doués comme Molinié, Rybinsky, Cosse. Et les classiques, comme Paillas, la Reyne, Lamartine, qui font de très belles choses
Vous plaidez pour une appellation Cahors Blanc. Pour quelles raisons ?
Il y a ici de grands blancs. Je pense à celui, magnifique, que fait Christian Belmon à Goujounac. Le chardonnay en milieu calcaire, ça marche et je ne vois pas pourquoi on s'en priverait ici.
Il faut également arriver à bien hiérarchiser les cahors. Il faut aussi que le cave coopérative retrouve un certain équilibre pour garantir des volumes.
Sigaud président de l'UIVC
Jean-Marie Sigaud a été élu hier matin président de l'Union interprofessionnelle du vin de Cahors (UIVC), Alain Janicot étant président délégué. Le tandem est reconduit. À noter l'arrivée de Jean Treil, le président de la cave coopérative, de Fabrice Durou, représentant des vignerons indépendants, et Philippe Lejeune (Château Chambert) pour le négoce. Enfin, à l'unanimité moins une voix, l'UIVC a rejeté la fusion pure et simple avec l'interprofession des vins du sud ouest, tout en se disant disposée à des rapprochements. À suivre…
PROPOS RECUEILLIS PAR LAURENT BENAYOUN.