Fruits et légumes
Les maraîchers attendaient un plan de sortie de crise à la hauteur de leurs difficultés. Ils sont déçus. / DDM, Morad Cherchari
Hier, le ministre Bruno Le Maire, n'a répondu que partiellement aux attentes des maraîchers largement représentés dans le Sud-ouest. Le plan de 25 M€ n'est pas à la hauteur de la crise.
Largement insuffisant ! Le plan d'aide de 25 millions d'euros annoncé hier par le ministère de l'Agriculture est loin de répondre aux attentes des producteurs de fruits et légumes. L'aide financière du gouvernement se découpe en deux volets, le premier de 15 millions d'euros destiné à soulager la trésorerie des agriculteurs via des allègements de charges ; le second de dix millions pour réorganiser la filière avec des aides à la restructuration des exploitations et à la cessation d'activités.
Mais Bruno Le Maire a beau compatir à la grande misère de l'agriculture, les mesures de sortie de crise ne parviendront pas à redresser la barre. « On en a ras-le-bol des belles phrases qui, au final ne trouveront aucune application », souligne François Lafitte, le président de l'Association des producteurs de fruits et légumes du Sud-ouest.
La crise est arrivée de tous les côtés : il y a eu la météo, la mévente liée à une consommation en repli, il y a eu le « tsunami » sanitaire de la bactérie E. Coli. Une conjoncture qu'on peut soigner par des mesures ponctuelles.
MALAISE STRUCTUREL
Mais les producteurs attendaient des réponses à des phénomènes structurels qui hantent les maraîchers. C'est d'abord le coût de la main-d'œuvre et le poids des charges en France quand l'Espagne applique un Smic deux fois moins élevé. Sur ce point cependant, les producteurs ont été entendus avec l'annonce par Bruno Le Maire de la baisse de 1 € du coût de la main-d'œuvre permanente agricole à partir du 1er janvier. À cette problématique de fond, s'en ajoute une autre : les producteurs ne s'estiment pas soutenus sur les marchés à l'exportation. Ainsi, 50 000 tonnes de pêches auraient été perdues en dix ans dans le Sud-ouest. « En cas de mévente, ça permettait de nous rattraper », poursuit François Lafitte. « Bruno Le Maire est revenu sur le dossier des grandes surfaces et de leurs marges excessives. Au pays du rugby, ça s'appelle taper en touche. Certes, la grande distribution a pu être contestée dans ses positions, mais elle n'est pas responsable de tout. Elle n'est que la caisse de résonance de nos difficultés », conclut-il.
Par contre, la volonté exprimée par l'État de réformer en profondeur l'organisation commune de marché des fruits et légumes, avec la mise en place d'outils spécifiques, répond aux demandes de la profession. Tout comme la nécessité pour les producteurs de se regrouper pour mieux se défendre face à la grande distribution.
Mais cette réforme pourra-t-elle être envisagée avant les échéances électorales ? C'est bien la question que posait hier la Coordination rurale.
"Pour mon exploitation, ces aides ne représentent presque rien"
Quelques heures seulement après la déclaration de Bruno Le Maire, David, producteur de pêche à Millas (66) est dépité. « Avant de connaître le détail des aides, je savais déjà qu'elles ne représenteront presque rien pour mon exploitation. Cela ne réglera rien pour la prochaine saison », explique-t-il. Installé en 2004, il exploite 40 ha de pêchers. Selon ces calculs, il pourrait perdre 150 000 € cette année. « Nous avons vendu à perte de 20 à 20 cts le kilo livré. Comment continuer dans ces conditions ? », poursuit-il, inquiet pour son avenir et celui de ses salariés. Pour Gérard Majoral, responsable de la FDSEA, « ce sont des mesurettes. 75 % des exploitations n' y auront pas droit à cause des règles de l'UE et des plafonds d'aide. Je suis dégoûté. 25 M€ pour toute la France agricole ? Les pêches dans le seul département des Pyrénées-Orientales, c'est déjà 30 M€ ! Les manifestations vont reprendre, c'est sûr », conclut-il.
Christian Goutorbe
Le chiffre : 6 500
producteurs> Aquitaine et Midi-Pyrénées. Les deux régions ont vu diminuer de 7% en dix ans le nombre de producteurs de fruits et légumes. C'est peu, l'érosion constatée à l'échelon national étant de 15 à 17%.
JEAN-MARIE DECORSE