Enquête après la mort suspecte d'un nourrisson
Drame
Joyce, le bébé de Séverine, est morte dans des circonstances troubles . /Photo DDM Xavier de Fenoyl. |
Que s'est-il passé dans le dortoir du centre départemental de l'enfance et de la famille (CDEF), route de Launaguet, à Toulouse ? Cette structure qui accueille des femmes étrangères avec enfants et en cours de régularisation de papiers administratifs est au cœur d'une enquête pénale ordonnée par le parquet des mineurs à la suite de la mort suspecte d'un nourrisson de 3 mois.
Le 1er février, Séverine, une Congolaise de 25 ans, hébergée avec son bébé par le CDEF, découvre sa petite fille de 3 mois, Joyce, inanimée sur son lit, à plat ventre, les bras écartés. Le bébé gisait dans son vomis et avait recraché du sang. « J'ai poussé un hurlement, dit la jeune femme encore sous le choc. Je suis tombée en arrière et j'ai perdu connaissance. »
Prise en charge par les secours, cette jeune maman, demandeur d'asile, loge à présent dans un hôtel. Elle est aujourd'hui suivie par une psychologue et une assistante sociale. « Ce 1er février, j'avais confié mon bébé au personnel de la halte-garderie du centre. Il était 13 heures et je venais à peine de lui donner le biberon. Je suis retournée dans ma chambre pour faire un peu de ménage. Vers 17 heures, j'ai voulu récupérer mon bébé. On m'a dit qu'elle dormait. Je me suis rendue dans le dortoir et j'ai découvert mon enfant mort. »
Un véritable choc pour cette jeune congolaise qui avait accouché, «sans aucun problème », selon elle, à l'hôpital Joseph-Ducuing, à Toulouse. C'était son premier enfant. Les services sociaux lui ont trouvé un logement de substitution durant un mois.
Depuis cette affaire, elle est également soutenue par la responsable de la communauté des femmes congolaises de Toulouse, Béatrice Lungela. « Nous n'avons obtenu aucune réponse satisfaisante de la part de centre départemental et de son personnel sur la mort du bébé. Cette affaire est gérée sans aucune humanité », dénonce Béatrice. L'enquête confiée aux policiers de la brigade de protection des familles devra établir s'il y a eu négligences ou pas dans la surveillance du nourrisson. L'autopsie a conclu à une mort subite. « Mais comment se fait-il que l'on laisse un nourrisson sur le ventre et sans surveillance ? », interroge la maman du bébé.
Joint à plusieurs reprises, le CDEF s'est refusé à tout commentaire, renvoyant systématiquement nos demandes vers l'institution de tutelle, le conseil général. Ce dernier ne fait aucune déclaration « sur une enquête en cours. »
« Des négligences certaines »
En cours d'obtention de papiers, sans emploi (320€ d'assedic), logée provisoirement et aujourd'hui sans enfant, Séverine n'a plus rien. « Sans doute considère-t-on, dans ce centre, que ma cliente, une Congolaise en cours de régularisation, est juste un numéro, une femme de passage dont la vie importe peu… », dénonce l'avocate de Séverine, Me Audrey Dince qui pointe du doigt des « négligences dans la surveillance du bébé. » Au-delà de ce drame, l'entourage de Séverine estime également que la gestion de cette affaire « manque sérieusement d'humanité. »
FRÉDÉRIC ABÉLA